10 avril 2017

La dernière page et la page d’après…

Posté par Paul dans la catégorie : l'alambic culturel; mes lectures .

Certains sont affolés ou inquiets parce qu’ils ont… « trop de choses à lire »… Ce n’est pas mon cas ! Plus la pile de livres « en attente » est élevée, plus ma quiétude est grande car j’ai ainsi la possibilité de me composer un « menu » à ma convenance ! Découvrir un auteur inconnu, retarder le moment attendu d’un plaisir assuré, faire l’effort de découvrir un livre entouré d’une aura de mystère. Il n’est pas toujours facile d’enchaîner deux lectures surtout lorsque le livre que l’on vient de terminer s’est avéré particulièrement prenant. Quand on a du choix devant soi, on peut alors opter pour diverses stratégies. On peut essayer de persévérer sur la voie du succès et  continuer dans la direction que l’on a choisie la fois d’avant ; espérer ainsi que l’on va prolonger l’instant de bonheur que l’on a connu (c’est rare mais ça existe !). Changer d’orientation permet d’éviter le risque en évitant toute comparaison inopportune. Quand on change de genre de lecture on sait que le plaisir éventuel se présentera dans des conditions différentes et ne viendra pas de la même direction. L’autre soir, j’ai terminé le premier roman traduit d’une auteure américaine que je ne connaissais pas, Jean Hegland. Il s’agit de « dans la forêt » publié chez Gallmeister. Les éditeurs français sont longs à la détente et les comités de lecture peinent parfois à détecter les ouvrages majeurs puisque la version américaine originale date de 1996. Depuis, Jean Hegland a commis trois autres romans. J’espère que leur traduction prendra moins de vingt ans, car un autre des thèmes d’écriture qu’elle a choisis, entre autres, m’intéresse.

CVT_Dans-la-Foret_7057 Je pense que vous avez compris que « dans la forêt » m’a beaucoup plu, bien que l’étiquette « nature writing » m’ait un peu hérissé le poil (je ne crois pas que la traduction de cette expression soit si difficile que cela à trouver !). Au fil des pages, en avançant dans cette histoire d’une famille qui tente de survivre , au cœur de la forêt, à une société qui s’écroule, j’ai retrouvé l’ambiance que j’avais trouvée dans certains livres de SF publiés dans les années 70. Je pense en particulier aux bouquins de Kate Wilhelm (méconnue en France ces dernières décennies, auteure entre autres de « Hier les Oiseaux » ou du « village ») ou d’Elisabeth Vonarburg (j’ai un troisième nom sur le bout de la langue, mais il ne veut pas sortir !)… L’apocalypse que nous présente Jean Hegland, n’en est pas vraiment une, mais plutôt une décomposition accélérée : plus de pétrole, plus d’électricité, plus de production industrielle… et tout part à vau l’eau. Ce n’est pas l’objet principal de son propos en fait. Ce qu’elle conte surtout c’est la mise en œuvre de pratiques de survie par deux adolescentes qui vivent dans une maison isolée au cœur de la forêt californienne ; deux sœurs, orphelines, après le décès de leur mère (suite à une longue maladie comme on dit dans les avis officiels) puis de leur père (décès « accidentel » cette fois). La société mourante ne sert que de toile de fond. Elle n’est là que pour expliquer l’ampleur des problèmes qui se posent aux deux survivantes et la manière dont leur « intégration » à la forêt va leur permettre de construire un nouveau type d’existence. On peut avoir des doutes quant au dénouement de l’histoire, mais il ne manque en tout cas pas de panache et d’humanité.

Bien que le thème soit assez classique, c’est passionnant à cause de la manière dont l’auteure raconte l’histoire et dépeint l’évolution psychologique des deux jeunes adultes. Leur vie n’a rien de paisible et ne se limite pas à cueillir des baies sauvages et à les grignoter assises autour d’un feu en grattant sur une vieille guitare. La réalité quotidienne est dure et Jean Hegland réussit bien à en montrer les différents aspects. Je ne vous donnerai pas d’exemple pour illustrer mon propos car je veux vous laisser le plaisir complet de la découverte. Il se peut qu’en vous présentant ce livre j’enfonce une porte ouverte (j’en ai l’habitude !) car j’ai lu, sur le site officiel de l’auteure, que son roman était dans le top du « box office » en France depuis plusieurs semaines. Je pense donc que les lectrices et les lecteurs branchés de ce blog ont déjà cet ouvrage sur leur table de nuit.

Logo_Babelio J’ai lu cette histoire assez vite (trop sans doute, j’y reviendrai) car j’ai été bien captivé et puis je ne m’étais pas intéressé aux histoires de survie depuis pas mal d’années. J’ai posé le livre à côté de l’ordinateur, avec l’intention d’en extraire quelques citations bien choisies à mettre en ligne sur Babelio (et oui ! depuis l’époque où je vous ai parlé pour la première fois de ce « réseau social » de lecture, sur la toile, j’ai continué à y participer de manière très irrégulière. Ensuite, comme ma journée n’était pas encore terminée et que mon cerveau n’était pas encore aux abonnés absents, s’est posée la question du… « c’est bien, et maintenant par quoi continuer ? ». Et c’est souvent une question un peu délicate ! Pas moyen de rebondir sur un autre livre de la même catégorie comme je l’ai fait assez souvent cet hiver. Le souffle un peu coupé, j’avais besoin d’une pause, ou plutôt d’une rupture, pour retrouver ma respiration. Les livres qui m’accrochent beaucoup, surtout quand il s’agit de fictions, ont tendance à repousser mon sommeil, sans doute parce qu’ils agitent un peu trop les neurones dans le bocal. J’ai besoin d’apprivoiser cet animal caractériel, le « dodo », en l’approchant avec subtilité et surtout en ressentant une certaine quiétude. J’ai dû passer un long moment à trouver une « suite » répondant à toutes mes exigences crépusculaires…

Cahier10 Je suis en outre dans une phase où je ne supporte pas les romans « noirs », où les essais politiques me fatiguent, où j’ai besoin de lectures pas trop « prise de tête » comme on dit parfois, pour me prélasser dans un bain relaxant qui soit à ma convenance. J’ai donc laissé de côté (entre autres) « je vous écris de l’usine » de Jean-Pierre Levaray, « l’islam contre l’islam » d’Antoine Sfeir ou « la voix secrète » de Michaël Mention (un polar historique sous le règne de Louis-Philippe). Ils gardent leur place dans ma « réserve » et je m’occuperai de leur cas plus tard ! J’ai feuilleté un moment « la révolution d’un seul brin de paille » de Masanobu Fukuoka, la bible des permaculteurs enthousiasmés par leur nouvelle approche de l’agriculture. Certes je suis en période jardin mais les essais sur le thème du « Y’a qu’à » ou du « Suffit de » ont quelque chance de faire grimper mon adrénaline : pas bon pour le sommeil. Comme j’avais reçu par le courrier du jour toute une livraison des éditions « Plein Chant » qui réalisent un travail remarquable pour mettre au goût du jour les écrivains prolétariens (de Bourgeois à Poulaille en passant par Massé et Guillaumin), j’ai choisi de feuilleter le numéro 1 des cahiers de l’association des amis d’Henry Poulaille (déjà une relique !). Je suis déjà membre des amis de « Jacques Lacarrière », de « Claude Tillier » et de « Régis Messac », mais n’ai pas eu le temps d’adhérer à l’association qui rend hommage à Henry Poulaille avant qu’elle n’ait cessé d’exister me semble-t-il.

oasis-interditesJe me suis aperçu que le changement était plutôt radical, mais cela m’a permis de « digérer » un peu ma lecture précédente. J’ai ensuite remis sur la pile le bel ouvrage que j’avais entre les mains et j’ai réussi à faire mon choix définitif : je me suis plongé dans un bouquin d’Ella Maillart. J’ai commencé à lire les écrits de cette grande dame voyageuse au mois de février, et je me suis lancé (pour l’instant avec grand plaisir aussi) dans « Oasis interdites », le récit qu’elle a rédigé pour raconter son voyage dans le Xinjiang et le Cachemire avec Peter Fleming (le gars qui a inspiré un héros célèbre à son frangin Ian). Le désert a remplacé la forêt et, là aussi, on est quelque peu sur les marges de la civilisation occidentale florissante… C’était un bon choix : continuité dans l’aventure mais changement dans ses motivations et dans son décor ! C’est le troisième titre que je lis d’Ella Maillart et si l’inspiration me vient je vous parlerai un peu plus longuement de ce nouveau parcours dans la littérature de voyage… Mais plus tard ! Pour l’heure, j’écoute le chant des oiseaux de nuit qui commencent à s’agiter de plus en plus : il est vrai que, cette fois, le printemps est là ! Demain, je plante… un asiminier ; vous connaissez ?

2 Comments so far...

Olivier Messac Says:

15 avril 2017 at 18:47.

Non non non ! L’association qui rend hommage à Henry Poulaille n’est pas morte. Elle sera présente samedi 22 et dimanche 23 avril au salon du livre libertaire, à Paris IVe, espace des Blancs-Manteaux, 48 rue Vieille-du-Temple.
On peut aussi écrire à l’un de ses responsable, Jean-Paul Morel, 11 rue Taine, 75012 Paris.
Qu’on se le dise ! Et longue vie à la Feuille charbinoise.
Mille amitiés.

Paul Says:

18 avril 2017 at 08:13.

@ Olivier Messac – merci pour cette rectification. En fait j’avais procédé à une déduction un peu trop rapide du fait que je n’arrivais pas à trouver d’adresse postale ou de contact sur le web. Grâce à vous ce manque est rectifié, et je vais donc pouvoir les contacter prochainement.

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