21 mars 2010

Mon p’tit bonhomme de chemin

Posté par Paul dans la catégorie : au jour le jour... .

vespa-400 Quatre cents kilomètres à pied, ça use, ça use…

Une chronique, qu’elle porte le n° 399, le n°400 comme celle-ci, ou le n°401 comme la prochaine à venir, finalement c’est toujours une chronique : une intuition soudaine qui vient à l’esprit, un travail de recherche plus ou moins long, du temps passé à écrire, relire et corriger, un petit moment d’appréhension quand on est sur le point de cliquer sur le bouton « publier ». Pourtant, je cède plus ou moins consciemment à ce diktat de la symbolique : dans mon esprit, finalement, 400 c’est un peu différent de 399 ou de 401. Je concède que c’est assez ridicule finalement de porter une attention particulière à un texte parce que, dans l’ordre de publication, il se trouve qu’il porte un numéro tout rond. Mais bon, j’assume… on ne se change pas aussi facilement que ça. Et puis, surtout, j’en ai parlé avec mon confesseur (le dernier en date – le précédent ayant été viré pour cause de gérontophilie), la faute est relativement bénigne. Mon psychanalyste (le dernier en date, le précédent étant parti aux Seychelles avec une blondinette), pense que cet excès de cartésianisme a sûrement ses causes enracinées dans ma scolarité primaire (à l’école laïque – non je n’étais pas chez les Jésuites). J’avoue donc, sans trop de honte, avoir quelque peu hésité sur le contenu du texte que j’allais publier aujourd’hui, et surtout sur la catégorie dans laquelle il allait être rangé. J’ai envisagé, un temps, de me laisser porter par l’actualité et de vous parler de Simone Weil. Pas la Simone qui est rentrée chez les Immortels par la grande porte (Simone Veil) mais son homonyme, celle qui est morte en août 1943 et qui s’était distinguée, entre autres, en combattant dans les rangs des Brigades Internationales, pendant la Révolution espagnole. Juste histoire d’émettre un coassement dissonant dans le concert de platitudes qui est produit par les médias en ce moment. Mais bon, le sujet ne m’inspirait pas plus que ça (ce qui ne veut pas dire que… d’ailleurs !). 400, le nombre donnait envie aussi de jeter un coup d’œil du côté de la fondation de Québec, mais c’était déjà du passé, et, de surcroît, j’avais déjà commémoré l’événement. Non, ce qu’il me fallait, c’était casser un peu la routine, le traintrain bloguesque quotidien.

Il se trouve que j’adore les routines. L’avantage d’en avoir quelques unes c’est que, de temps en temps, quand l’envie de changement se fait pressante, on a quelque chose sous la main, là tout près, à envoyer balader d’un geste rageur. On fait sa petite révolution, pépère dans son coin ;  on enfonce deux touches du clavier de l’accordéon à la fois ; ça produit un horrible couac et on est content. La semaine d’après, on retrouve avec plaisir la nouvelle paire de pantoufles qu’on a choisi d’enfiler. Elles sont bleu clair alors que les précédentes étaient vert foncé – il faut bien avoir fait la révolution pour quelque chose quand même – et on les porte jusqu’au nouveau coup d’état qui permettra de les remplacer par des gris souris ou anthracite. Double défi donc : il fallait d’une part que j’écrive hors de mes sentiers battus et d’autre part que je sorte de mes grognements habituels car il me fallait commémorer la quatre-centième. Je me suis donc creusé les neurones, ce qui est une tâche infiniment délicate, car, non seulement j’en ai de moins en moins, au fil du temps, mais de plus, il faut un outillage ultra miniaturisé. Pas étonnant donc que les résultats n’aient rien de convaincant.

quatresanscul 400… J’ai trouvé que cela s’harmonisait bien avec les quatre cent coups, prétexte à un pamphlet autobiographique ou militant exemplaire… Le problème c’est que j’ai, dans l’ensemble, toujours été relativement raisonnable dans mon délire, et que je n’ai sans doute jamais atteint un objectif chiffré aussi important. Je préférerais, en sus, que mon autobiographie soit publiée post mortem. Les raisons sont nombreuses ; il y en a une qui est importante c’est qu’un certain nombre de gens dont je pourrais dire du mal sont encore vivants et j’ai horreur de la violence physique, surtout quand elle me concerne directement. Restait le film, « les quatre cents coups », chef d’œuvre de François Truffaut d’après les encyclopédies du cinéma… Le problème c’est que j’aurais eu bien de la peine à produire un texte d’une longueur convenable sur le sujet : soit je l’ai vu, mais son contenu et l’impression qu’il m’a laissée sont égarés quelque part dans le grenier poussiéreux de ma mémoire, soit, ce qui est plus envisageable, je ne l’ai sans doute jamais vu. Raté donc pour la belle envolée lyrique et cinématographique. Un petit lutin sauvageon qui se terre quelque part dans mon cerveau, m’a alors suggéré un thème plus original que les précédents. Je pourrais intituler ma chronique « les quatre sans cul » et rédiger une nouvelle aussi peu érotique que possible, en y casant quelques jeux de mots pitoyables du genre « un éléphant ça trompe énormément ». Mais qui allait comprendre un tel amas de subtilités, à part les Savoyards authentiques ou les passionnés de l’architecture du vieux Chambéry ? Il s’agit en effet d’une allusion à une sculpture célèbre (cf photo) située dans cette charmante bourgade et représentant quatre éléphants tronqués… Il n’était pas question que « la Feuille » perde sa dimension cosmique et qu’on l’enferme de manière trop restrictive dans la catégorie des blogs régionalistes, d’autant plus que la Savoie, moi… Ils sont bien gentils les Savoyards, mais ça ne fait même pas 400 ans qu’ils sont rattachés à la France (150 en fait pour faire plaisir aux historiens qui n’aiment pas les approximations).

ours_des_pyrenees_aspe_2002 Panne d’inspiration : ça allait de mal en pis… Il y avait aussi la piste de l’an 400, passionnante sur le plan historique, mais 400 avant ou 400 après la naissance de notre très saint sauveur, délicat de choisir ; mélanger les deux pouvait créer de graves lésions chronologiques dans le mental de mes jeunes lecteurs/trices. Je pouvais aussi lancer une chronique jardicole sur le thème des 400 trous pour planter des arbustes dans notre arboretum en herbe, sauf que des trous j’en ai creusé bien plus de 400, alors c’était un mensonge. Esprit bassement matérialiste, j’aurais pu profiter de l’événement pour lancer une souscription à hauteur de 400 euro auprès de mes lecteurs/trices…. mais 400 euro, franchement, on fait quoi avec 400 euro ? Cette histoire de 400 a fini par me prendre la tête : elle devenait un peu trop obsessionnelle. Ecrire ceci ? Bof, vraiment plat. Ecrire cela ? J’allais perdre pour la quatre centième fois de suite, le quart de mon lectorat. Si au moins 400 c’était le nombre des députés à l’assemblée ou le nombre d’invités à la garden partouse de l’Elysée, j’aurais pu vous dire tout le bien que je pensais de ces personnes ou de cette réunion mondaine incontournable. S’il y avait eu 400 ours dans les Pyrénées, j’aurais pu partir sur une tirade écolo… 400 postes supprimés dans l’Education, je pouvais dégainer un petit couplet social… Si la tirade du Cid (pas UNATI, l’autre) avait débuté par un « nous partîmes quatre cents, mais par un prompt renfort… » Décidément, même Corneille ne faisait pas d’effort : il m’ôtait de la plume une grandiose chronique littéraire… Mais non, 400 ne collait ni dans un cas ni dans l’autre. 400 ne collait à rien de rien dans l’actualité.

clown Arrivé à ce point là de mon aventure, le compteur de mots en bas de la fenêtre de saisie, affichait 631. Là aussi c’était rapé : si j’avais gommé ma saisie jusqu’à revenir au fatidique 400ème mot, ce texte assez pitoyable devenait du grand n’importe quoi… A éviter absolument un jour de grande commémoration. D’autant que j’attendais des officiels, des personnalités respectables du milieu bloguesque, des blogonautes distingués… Ce n’est pas le fait que ce que j’écrivais les passionnait, mais pour ce quatre centième, j’avais laissé entendre qu’il y aurait sans doute un cocktail virtuel, vers 18 h, un soir de la semaine. Il fallait que je sois à la hauteur (si c’est la tienne, ne manqueront pas de penser certains de mes amis/es, particulièrement peu charitables, tu n’as pas besoin de t’élever bien haut) et ce n’est pas avec une introduction interminable que j’allais faire saliver mes admirateurs/admiratrices et leur donner envie de poursuivre. Il était donc grand temps de rentrer dans le

Vif du sujet

Ainsi soit-il. J’allais rédiger un début d’autobiographie ; ça c’était du sérieux. En plus je pourrais faire ça sous forme de feuilleton (j’adore les feuilletons). Les premières années (semaines) de ma vie avec la chronique n°400, la suite avec la cinq centième et patin couffin. Je pense qu’il n’y a pas besoin que je vous explique la règle du jeu pour la suite. Ma mémoire n’étant pas très fiable, j’ai commencé par faire quelques recherches sur la toile… Wikipedia par exemple… Le problème c’est qu’entre « Anouilh » et « Weil », je n’ai pas trouvé mon nom ; encore moins mon pseudo. Des Feuilles, il y en avait de toutes sortes, mais aucune n’avait ma trombine. Etait-il possible qu’il n’y ait rien à dire au sujet de mes premières années ? Le tiroir de ma mémoire était-il vide, non pas en raison d’une lésion dangereuse quelconque, mais simplement parce qu’il n’y avait aucun événement notable à raconter. C’était désespérant ; un feuilleton commençant par un épisode vide ; ce n’était guère motivant. J’ai donc décidé de laisser tomber les années passées et de m’intéresser au présent. J’allais intituler ma chronique « Mon p’tit bonhomme de chemin ». C’était simple, direct, un brin émouvant, un rien naturaliste. De bons ingrédients en ces temps d’écologisme galopant. Je fis donc une première tentative. Ça ressemblait à ça :

épisode 1

sentier-dans-les-vosges « Je continue donc à suivre mon p’tit bonhomme de chemin, mon chemin de fer touristique, mon radeau d’aventure. J’ai laissé de côté les bossus et les grinchus, les donneurs de leçons et les distributeurs de sanctions, les parasites et les profiteurs… et tant d’autres encore dont je n’ai que faire tant j’ai d’amis/es dans mon sac à dos, dans mon wagon, dans ma dunette.  Je n’ai pas de rétroviseur et j’aurais de la peine à vous décrire les lieux par lesquels il est passé ce p’tit bonhomme de chemin… Je n’ai pas de boule de cristal et j’ai du mal à prévoir où il va me conduire. Mes pieds n’y sont pas toujours en sécurité : il m’arrive de trébucher sur une idée trop vite toute faite ou de déraper dans un virage un peu trop serré. Mais ce que je sais c’est que je n’ai jamais fait marche arrière pour choisir un autre embranchement. J’en ai choisi un parmi d’autres. Pourquoi monter plutôt que virer, descendre plutôt que d’aller droit ? Des raisons valables sans doute, mais peu de certitudes : un éclat de lumière, une fleur mauve blottie dans la mousse, le clin d’œil d’un/e ami/e, une invitation à venir boire, danser, me réjouir, compatir, débattre, embrasser, bricoler… Je ne peux tous les énumérer ces signes de piste, ces panneaux discrets…. Il se pourrait bien qu’il y en ait plus de quatre cents et cela me mettrait dans un grand embarras. Au fil des ans, j’ai garni ma hotte d’idées nouvelles, et j’ai dû parfois faire quelques pauses pour y mettre un peu d’ordre. » (A suivre – épisode 2 à la chronique 500)

post-scriptum

A part ça ? Une sacrée bonne femme cette Simone Weil. Renseignez-vous !

7 Comments so far...

JEA Says:

21 mars 2010 at 17:52.

Pour les 400 coups, ah la musique de Jean Constantin…
Il écrivit aussi une chanson su cette même mélodie : « Comment voulez-vous ? »
Faute d’avoir trouvé autre chose, ce n’est qu’un début :
– « http://musique.fnac.com/a602830/Jean-Constantin-Les-plus-belles-chansons-de-Jean-Constantin-CD-album?Fr=0&To=0&Mu=-13&Nu=1&from=1&Mn=-1&Ra=-28#ecoutes »

fred Says:

22 mars 2010 at 08:51.

Vivement la 666ème Chronique !
Et à propos de Simone, ça me rappelle un vieux graffiti :
« Français, dormez tranquille, Simone Veil ! »

la Mère Castor Says:

22 mars 2010 at 09:50.

va pour tes 400, inimitables. Et à la millème !

la Mère Castor Says:

22 mars 2010 at 09:51.

millième, fichtre !

Grhum Says:

22 mars 2010 at 21:45.

400 : fastoche pour le thème, c’est en mètres la distance d’un tour de piste d’athlétisme !
Mais bon, pas sûr que ça inspire le rédacteur de la feuille…

Lavande Says:

23 mars 2010 at 10:56.

Pour 400, j’ai pas de proposition, mais j’en ai une pour 500, à mettre en réserve:
« Nous partîmes cinq cents; mais par un prompt renfort
Nous nous vîmes trois mille en arrivant au port,
Tant, à nous voir marcher avec un tel visage,
Les plus épouvantés reprenaient de courage ! »
ce sont les lecteurs de la Feuille que Corneille décrivait bien sûr.
Tu pourras remplacer trois mille par cinquante mille ou plus suivant le nombre de lecteurs que tu auras atteint à ce moment là.

Zoë Says:

23 mars 2010 at 15:11.

Ce sont les quatre centièmes rougissants ? En tout cas, il est bien sympathique le petit bonhomme du chemin

Leave a Reply

 

Parcourir

Calendrier

avril 2024
L M M J V S D
« Avr    
1234567
891011121314
15161718192021
22232425262728
2930  

Catégories :

Liens

Droits de reproduction :

La reproduction de certaines chroniques ainsi que d'une partie des photos publiées sur ce blog est en principe permise sous réserve d'en demander l'autorisation préalable à (ou aux) auteur(s). Vous respecterez ainsi non seulement le code de la propriété intellectuelle (loi n° 57-298 du 11 mars 1957) mais également le travail de documentation et de rédaction effectué pour mettre au point chaque article.

Vous pouvez contacter la rédaction en écrivant à