La feuille Charbinoise

19 février 2008

Pic de production…

Posté par Paul dans la catégorie : Humeur du jour; Vive l'économie toute puissante .

Avertissement préliminaire : pour tous ceux qui aboutiraient à cette chronique après une longue recherche sur Google, par exemple, sur les termes « pétrole » ou « production de pétrole », inutile d’aller plus loin. Ce billet est rédigé par un non expert, incompétent, et ne repose sur aucune donnée autre qu’une intuition. La lecture de ce tissu d’inepties ne peut vous être utile que si vous aviez lancé une recherche pour savoir si baril prenait « un r » ou « deux r » ou s’il fallait un accent aigu ou un accent grave à « pétrole ». Mes prétentions s’arrêtent là!

Ce matin, au réveil, j’ai eu une intuition en lisant l’avenir à la surface ridée de mon bol de thé : nous allons atteindre aujourd’hui, le 19 février, à midi, le pic de production pétrolière tant annoncé depuis des décennies et prévu, selon de vrais experts, pour cette année, pour 2010 ou pour 2020. Ce fameux pic, dans les années 70 on l’annonçait pour 80, dans les années 80 pour 90, les témoins de Jéhovah – là je me marre pour ceux qui vont chercher « Jéhovah » sur leur moteur de recherche – étaient convaincus que c’était pour l’an 2000… Certains le voient devant nous, d’autres derrière ; moi je dis il est maintenant, je le sens, à l’heure où va paraître ce billet il sera là. Quand vous me lirez, il sera sans doute trop tard, mais réfléchissez bien : vers midi, vous n’avez pas ressenti une impression curieuse ? Quelque chose d’un peu différent du champ du cygne de votre estomac ou des hurlements de votre dent creuse ? Faites un effort… Rien ? Vraiment rien ? Ah, vous voyez bien qu’il s’est passé quelque chose : si vous vous branchez sur votre inconscient – wifi ou pas wifi le branchement – il vous répondra objectivement que oui, un phénomène particulier s’est déroulé à midi le 19 février. C’est la preuve évidente que j’ai raison et que mon intuition est la bonne.

Tout cela vous paraît un peu fantaisiste ? Sachez qu’en matière de production pétrolière, les données et leur analyse sont tellement fluctuantes qu’on peut les considérer comme tout aussi approximatives. Les experts situent le pic de production du pétrole dans une fourchette allant de 2005 à 2020 (un ou deux originaux proposent 2030 ou 2060). Les gouvernements sont beaucoup plus optimistes et ce pour deux raisons. Dans les pays consommateurs, rien n’est vraiment prévu pour faire face à la pénurie, mieux vaut donc rassurer les populations (et se rassurer soi-même, politique de l’autruche). Dans les pays producteurs, on joue les « gros bras » et l’on triche systématiquement sur l’état des réserves nationales, c’est un fait connu. Quant aux compagnies pétrolières, c’est selon les besoin du marché, un jour noir, un jour blanc… Les annonces de découvertes de nouvelles ressources donnent un petit coup de pouce aux cours de bourse, les menaces de pénurie permettent de calmer un peu le jeu.

Les réserves de pétrole sont probablement encore très importantes, mais l’un des facteurs décisifs à prendre en compte lorsqu’on estime le potentiel de production, c’est le coût à la fois de l’extraction et du raffinage. Toutes les nappes ne produisent pas un brut de la même qualité et il est fort probable que les gisements de pétrole à la fois de très bonne qualité et faciles à exploiter seront de moins en moins courants.

Le prix du baril de pétrole frôle les 100 dollars ; l’année prochaine il sera à 150 ; en 2010 il sera à 200 et en 2015 à 400 (mais ce ne seront plus des dollars mais une autre monnaie de singe car les USA auront perdu une grande partie de leur puissance économique). Les écologistes applaudissent des deux mains, surtout les écologistes riches : Madame Lagarde ira au ministère en vélo, on utilisera moins sa bagnole, on baissera d’un ou deux crans le thermostat du chauffage et ce sera un coup de pouce formidable pour le développement des énergies renouvelables. En bref, coincé devant le mur, l’homme sera obligé de réfléchir et de prendre son destin énergétique en main (c’est beau non ?). Dans une réalité plus terre à terre, il est probable que c’est Monsieur Toulemonde qui va se prendre les premières conséquences de la crise en travers de la gueule. Le budget essence n’est qu’une petite fraction des revenus d’un cadre supérieur. Il lui suffira d’épargner un peu moins et il pourra continuer à faire rouler sa grosse cylindrée pour aller se promener au Sahara (je vous parie que ce n’est pas le prix du carburant qui fera stopper le Paris-Dakar !). De même ce monsieur dispose des fonds suffisants pour opérer une reconversion rapide de son système de chauffage. Les chaudières de conception récentes chauffent mieux tout en consommant moins et pour une ou deux dizaines de milliers d’euro, on peut mettre en place un système de chauffage « alternatif » très séduisant. Monsieur Toulemonde, lui, achètera un ou deux pulls en laine fabriqués au Pakistan et regardera « qui veut gagner des millions » en attendant des jours meilleurs. Les charlatans habituels profiteront de cette crise pour proposer les solutions les plus farfelues et vous promettre encore une fois que « demain on chauffera gratis » ! De leur côté, madame AREVA et sa fifille EDF en profitent pour réclamer une nouvelle louche de nucléaire pour tout le monde… La galère, je vous dis !

Pour ceux qui ont soif d’informations sérieuses, je vous propose deux adresses de sites sur lesquels j’ai trouvé des choses intéressantes : oleocene.org, site dédié à la fin de l’âge du pétrole et le loup derrière la porte, site anglais presque entièrement traduit en français, très documenté. Je sais qu’il en existe beaucoup d’autres, mais il faut faire un choix ! Le graphique publié en illustration provient du site n°2. Le bleu représente les découvertes de nouveaux gisements dans les années passées (et non l’état des stocks) et la courbe indique l’évolution de la consommation.

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