5 août 2008

Récréation horticole et savoyarde (première étape)

Posté par Paul dans la catégorie : Carnets de voyage .

Je vous ai conté assez largement notre séjour dans les Fenouillèdes au mois de février ainsi que notre escapade irlandaise au mois de mai, mais j’ai gardé le silence sur le petit tour que nous avons fait en Haute-Savoie au début du mois de Juillet. Cette dernière virée était largement axée sur le thème des jardins et elle nous a permis de découvrir trois lieux enchanteurs, fort différents les uns des autres, mais tout aussi agréables à visiter. Si vos pas vous conduisent un jour dans la région située entre Annecy et le lac Léman, n’hésitez pas à « perdre » quelques heures pour visiter, comme nous l’avons fait, « les jardins secrets », « la jaysinia » et le « jardin des cinq sens »… Ces trois sites sont tout à fait complémentaires et permettent une approche originale du monde parfois hermétique des parcs et jardins botaniques.

Première escale à Vaux, non loin d’Annecy, pour visiter « les jardins secrets ». Une petite route sinueuse à flanc de colline, puis au fond d’un vallon verdoyant, permet d’accéder au hameau où se trouve ce site singulier. Dès l’approche, on se rend compte que l’on va pénétrer dans un univers n’ayant probablement que peu de rapport avec son environnement immédiat. Les abords des jardins sont clos et, de l’extérieur, on n’a qu’une idée très limitée de ce que l’on va découvrir une fois le seuil franchi. Seule la décoration des bâtiments, la présence de nombreuses sculptures et ornementations en bois, fournissent des indices et permettent de deviner que l’on va pénétrer dans un lieu où les constructions et les aménagements réalisés par la main de l’homme jouent un rôle prédominant. L’accueil des visiteurs se fait dans une cour intérieure, bordée d’une galerie en bois et au centre de laquelle se situe un bassin. Il faut attendre qu’un petit groupe soit formé avant que le guide n’ouvre la porte du « sanctuaire » et, aussitôt celle-ci franchie, on est immergé effectivement dans une ambiance n’ayant que peu de rapport avec le décor rural extérieur. On se rend compte que l’on va évoluer dans un labyrinthe de patios bordé de galeries, comme si le décor de « l’antichambre » réservée à l’accueil se reproduisait à l’infini, chacune des salles ayant toutefois sa singularité, à la fois grâce au style des constructions qui y sont réalisées et au choix de végétaux qui ont été plantés pour décorer les plates bandes.

L’ambiance orientale est indéniable : on a par moment le sentiment de se promener dans les jardins de Cordoue ou de Grenade. Mais il ne s’agit pas du tout d’une « copie conforme » de ces jardins d’Andalousie. Très vite on s’aperçoit que l’on est dans un lieu qui a sa personnalité propre. Les raisons de cette singularité se dévoilent peu à peu, au gré des cheminements. Le choix des matériaux, par exemple, est différent de celui des jardins arabes : le bois taillé, découpé, sculpté est omniprésent. Les motifs d’ornementation choisis rappellent plus les traditions populaires des Alpes que le style des fresques andalouses ou marocaines. Les végétaux n’ont que peu de rapport avec les plantes et les arbres que l’on peut trouver dans les parcs du sud de l’Espagne. Comme à Grenade, par contre, l’eau est omniprésente, circulant dans des caniveaux, dans des bassins, s’écoulant par de multiples cascades et jets décoratifs. Au plaisir des yeux s’ajoute celui de l’oreille : où que l’on soit, on entend le gargouillis de l’eau et les chants des oiseaux qui ont trouvé refuge dans ce dédale de branches et de planches, de niches et de corniches. Le sens olfactif aussi est à la fête : de nombreuses plantes ont été choisies pour leur parfum agréable, et les senteurs du pin cembro, du mélèze et du sapin du Nord imprègnent l’atmosphère des galeries ombragées.

En début de visite, avant de nous abandonner à la découverte de ce labyrinthe bâti dont les dimensions s’accroissent chaque année, le guide nous a donné quelques clés et surtout expliqué la génèse de ces « jardins secrets ». En 1980, lorsqu’ils ont racheté cette ancienne ferme abandonnée avec ses terres en friche aux alentours, Nicole et Alain Moumen n’avaient aucunement l’intention d’en faire un site ouvert au public. Lui était menuisier ébéniste et construisait des meubles de style montagnard, et elle, peintre sur bois, les décorait. Le jardin est né progressivement : œuvre du couple au départ, enrichie par la suite par l’aide qu’ont apportée leurs enfants ayant « adhéré » très jeunes au projet. Le petit jardin s’est agrandi au fil des travaux et des idées parfois farfelues d’Alain. C’est une véritable mosaïque de décors qui s’est peu à peu mise en place, au gré de l’imagination de ses concepteurs. Les amis ont apprécié le travail et incité les créateurs à montrer leur œuvre originale au public. La première ouverture « officielle » a eu lieu en 1994 soit quatorze ans après le début des travaux. Depuis, la propriété de Vaux est devenue une attraction touristique dont la fréquentation va croissante : plus de 35 000 visiteurs les dernières saisons.

La maison originelle de la famille s’est transformée en un petit musée de la brocante : un dédale de pièces enfermant des quantités d’objets anciens classés par thème. On passe ainsi d’une pièce évoquant le cabinet d’un apothicaire à une chambre d’enfants meublée à l’ancienne avec lit clos et buffet peint. Ce n’est pas tant la valeur des objets exposés qui est intéressante que la façon plaisante dont ils sont mis en valeur. Si le bois est privilégié dans la décoration, d’autres matériaux ont été utilisés dans les travaux récents, notamment le cuivre, la pierre et un « mélange maison » à base de chaux pour réaliser des moulages (corniches, statuettes…). Le parcours extérieur, que vous pouvez effectuer à votre convenance, vous permettra de passer de la « cour du grand marronnier » à la « cour des calades », des « loges de la folie » à la « galerie des moucharabiehs »…

Nous sommes restés plus de deux heures à « errer » de recoin en recoin et, lorsque nous sommes sortis, nous avions le sentiment de ne pas avoir perdu notre temps et nous avions déjà en tête les noms des amis ou des proches à qui nous aimerions offrir un tel moment de rêverie. Je dois avouer aussi que, après cette visite, mon interminable liste de projets s’est bien entendu considérablement rallongée ! Il faut dire qu’un endroit réservant une telle place aux constructions en bois ne pouvait pas laisser indifférent bien longtemps un « boiseux » de mon espèce… Après un bref passage au château de Montrottier, nous avons pris la route pour notre seconde escale botanique, de l’autre côté d’Annecy, à Samoëns, toujours en Haute-Savoie… Selon la formule consacrée, ceci est, bien entendu, une autre histoire ! (A suivre !)

NDLR : photos « maison » bien entendu ; ce jour là c’était Caly qui était derrière l’objectif ; une petite sélection parmi la cinquantaine de clichés qu’elle a réalisés. Il faut dire que le site est particulièrement « photogénique ». Histoire de savoir si vous avez été bien attentif : une « calade » vous savez ce que c’est ?

One Comment so far...

leirn Says:

6 août 2008 at 10:43.

C’est drôlement joli comme endroit et inattendu en plus. Ca donne envie d’y aller.

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