11 août 2008

Récréation horticole et savoyarde (l’étape finale)

Posté par Paul dans la catégorie : Carnets de voyage .

La première impression que nous avons eue du village d’Yvoire, sur les bords du lac Léman, n’était pas très bonne : site ultra-touristique avec tout ce qui accompagne et pollue ce genre d’endroits, à savoir (pour n’en citer qu’une partie), cohue, parkings payants et hébergements à des tarifs record. Nous avons donc joué à « coucou, bonjour, c’est nous ; au-revoir ! », avec l’intention d’aller voir ailleurs et de revenir le lendemain à l’aube, avant le déferlement des campings cars, des autocars et des barbares. Il faut dire qu’Yvoire est un site médiéval réputé, inscrit dans la liste des « plus beaux villages de France » et que rien que la vision que l’on a des ruelles par la porte principale, ainsi que la silhouette massive de la tour du château, donnent envie de regarder tout ça d’un peu plus près. De surcroît, c’est à Yvoire que se trouve le « jardin des cinq sens » qui est le troisième objectif de notre raid botanique sur la Haute-Savoie, alors ce ne sont pas deux ou trois centaines de shorts, casquettes et lunettes de soleil qui vont nous effrayer !

Nous faisons finalement étape un peu plus loin sur les bords du Léman, à Excevenex. Notre chambre donne directement sur le lac, et le soir, nous nous endormons bercés par le bruit des vagues, un bruit assez impressionnant en fait : le vent aidant, on se serait presque crus au bord de l’océan ! C’est donc frais, dispos et bien repus, après un petit déjeuner en terrasse, que nous véhiculons nos shorts, nos casquettes et nos lunettes à nous dans les petites rues d’Yvoire. Il est trop tôt pour aller au jardin et nous avons largement le temps de parcourir en long et en large le village, de traîner sur le quai d’embarquement des bateaux qui proposent des croisières sur le Léman, de profiter de la vue superbe que l’on a depuis les bancs du parc municipal et surtout, de jouir du silence qui règne un peu partout. Par chance, le touriste, contrairement au paysan charbinois en goguette, est une créature peu matinale. A dix heures, lorsque nous nous présentons à l’ouverture des portes du jadin, nous sommes (presque) seuls : le bonheur !

Le jardin des cinq sens est installé dans les jardins du château d’Yvoire, protégé de la curiosité du public par de hauts murs en pierre. Il est aménagé en tenant compte de l’art et de la symbolique du Moyen-Âge et se présente comme une sorte de labyrinthe. Les pas du visiteur sont guidés par un dédale de charmilles et de pommiers palissés et l’on passe successivement d’une partie du jardin à une autre. Tout ce rituel est expliqué à l’entrée : comme aux « jardins secrets » nous avons droit à un mode d’emploi de la visite avant de pénétrer dans le jardin proprement dit. Quatre enclos principaux sont aménagés, chacun d’entre-eux correspondant à un thème et à un sens bien particulier : plaisir des yeux, du sens olfactif, curiosités végétales de textures variées, du plus doux au plus rugueux, plantes et légumes dégustés au moyen-âge… Comme dans beaucoup d’autres jardin c’est l’eau qui sollicite le sens de l’ouïe, mais aussi le chant des oiseaux installés dans une grande volière au centre du labyrinthe.

Le jardin des cinq sens bénéficie du label « jardin remarquable » depuis 2004, eu égard au travail réalisé par ses créateurs, tant en ce qui concerne la richesse botanique, que dans l’intégration au site historique et au travail d’entretien effectué. La création du jardin remonte à 1986, date à laquelle la famille Bouvier d’Yvoire, propriétaire du château du XIVème siècle qui se dresse au cœur du village, a décidé de reconvertir l’ancien potager pour l’ouvrir à la visite. L’aménagement du lieu incite à la flânerie et à la rêverie, quel que soit l’endroit où l’on se trouve : dans le « tissage », sorte de prairie dans laquelle s’entremêlent une variété de roses blanches très parfumées et des graminées ondoyant au vent, ou sous le cloître de verdure que constituent les charmilles adroitement taillées. Si l’histoire des plantes, de l’alimentation et de la pharmacopée végétale vous intéresse, vous pourrez également enrichir considérablement vos savoirs grâce aux fiches explicatives proposées à l’entrée des clos et aux nombreux pannonceaux d’identification disposés dans les plate-bandes. De l’usage particulier de la belladone aux vertus nombreuses du romarin, votre connaissance des « simples » fera, je n’en doute pas, un sérieux bond en avant. Mais attention, toutes ces merveilles végétales ne sont pas inoffensives !

Lorsque nous sommes sortis du parc, la foule avait envahi les rues d’Yvoire, et nous n’avons pas eu envie de prolonger notre séjour. Un coup d’œil dans les boutiques alentour, enfin ouvertes, nous a permis de voir que rien d’exceptionnel ne nous était proposé et que les prix pratiqués rappelaient la proximité de la frontière suisse. Nous avons donc rejoint notre parking et repris le chemin du retour les yeux et la têtes remplis d’images merveilleuses. La voiture avait, visiblement, envie de prolonger son séjour haut-savoyard et il a fallu expliquer au moteur que nous n’habitions pas sur les rives du Lac Léman et qu’il fallait qu’il fasse un petit effort de bonne volonté pour rentrer à la maison. Au cas où vous vous poseriez des questions je peux vous le dire : la mécanique c’est nettement moins passionnant, à mes yeux, que la botanique ! S’il fallait établir un « hit-parade » des trois jardins que nous vous avons présentés dans ce reportage, nous serions bien en peine car chacun se classerait premier dans un domaine différent. Il est intéressant de visiter les trois car ils montrent chacun un aspect différent de ce que peut être l’approche de la botanique pour le grand public… La prochaine « feuille verte » sera consacrée à un petit tour de notre jardin en période estivale et des travaux que nous avons commencé à y réaliser…

NDLR : Toutes les photos ont été prises par Caly, sauf la première (difficile de prendre une vue « aérienne » sur un terrain plat !) qui provient du site officiel des jardins. La jolie fleur rouge, vous l’avez reconnue ? C’est du lin rouge (Linum grandiflorum florum pour vous en mettre plein la vue…)

4 Comments so far...

leirn Says:

11 août 2008 at 16:44.

Voué, ben c’est très très joli. Je suis fan.

Philippe Says:

4 septembre 2008 at 14:09.

C’est très joli, mais je suis un peu déçu : parler d’Yvoire sans en évoquer la tour, pourtant fameuse, il y a comme un manque…

fred Says:

4 septembre 2008 at 16:04.

et aussi de parler d’Yvoire sans faire référence à Arey c’est très iconoclaste !

Paul Says:

4 septembre 2008 at 17:02.

Au point où on en est…
Si on dit du mal d’Yvoire de toutes façons, le mieux c’est d’aller voir un ophtalmologiste, car bien mal Yvoire ne profite jamais !

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