22 janvier 2008
La nausée
Posté par Paul dans la catégorie : Humeur du jour .
Rassurez-vous, je ne vais pas vous parler du célèbre ouvrage de feu Jean Sol Partre (Marx ait son âme) comme l’appelait Boris Vian, mais du rapport Attali. En fait, au départ, je voulais vous parler de tout à fait autre chose : une recette de cuisine auvergnate sympa, le Pounti, mais j’ai senti sur mon épaule l’œil critique de mon beau-frère, François, qui allait me reprocher un blog fourre-tout, manquant de cohérence… François, c’est un peu mon directeur sportif : depuis qu’il m’a vu courir pour faire le tour de la maison, il veut m’entraîner pour faire le 100 m aux prochains jeux olympiques et, croyez-moi, il a du mérite ! Bon… Il faut veiller à ce qu’il y ait un peu de cohérence idéologique dans tout ça, alors le Pounti reste temporairement aux oubliettes (au moins jusqu’à demain).
Oui mais alors, pourquoi Attali et pas Carla Bruni ou les Etats-Unis puisqu’on est dans les chroniques en « i ». C’est la faute à la télé. Ça fait plusieurs jours que je lis sur internet des infos et des commentaires sur ce énième rapport d’un énième tocard et que ça me laisse totalement indifférent. Hier soir, pour meubler cinq minutes en attendant de partir au ciné voir l’excellent film de Sean Penn, « Into the Wild » (tiens c’est de ce film-là dont j’aurais dû vous parler ce matin, ça m’aurait mis de meilleure humeur), j’allume la télé et je tombe sur les infos de FR3 et sur la présentation du susnommé rapport. C’est incroyable comme la télé, et les infos en particulier, ça peut me faire sortir de mes gonds. Un tissu d’inepties pareil, et un Monsieur de la CGT (soit il est trop gentil, soit il a du temps a perdre) qui explique (d’un air un peu tristounet) qu’il s’est farci la lecture des trois cent pages et qu’il est un peu (on est à la télé) scandalisé par les mesures préconisées.
Avant d’entrer dans le vif du sujet, je me pose une question préliminaire… Un « rapport »… est-ce qu’on doit considérer ça comme un livre ? Je vous explique le problème. Il y a quelques années de cela, lorsque j’étais encore en activité, donc productif, j’ai reçu un jour dans ma boîte aux lettres un truc relié, signé Luc Ferry, et qui s’intitulait « Lettre à tous ceux qui aiment l’école ». J’aimais l’école mais je n’aimais pas du tout ce Monsieur et j’étais indigné par le gaspillage d’argent que représentait la diffusion de son bouquin. J’ai donc voulu lui réserver un très mauvais sort (au bouquin, pas au Monsieur, je ne l’avais pas sous la main malheureusement). Mon sang pardaillanesque n’a fait qu’un tour et j’ai voulu transformer les écrits ministériels en papier d’allumage pour ma chaudière. Un mien ami philosophe, présent à ce moment-là, a retenu mon bras vengeur et m’a fait remarquer, avec un regard lourd de reproches, que « brûler » un livre, ça ne se faisait pas, sauf dans les pays fascistes. Le livre de Ferry a donc traîné quelques temps dans la bibliothèque de mes WC, puis il a fini dans une benne à recyclage de papier, après avoir été refusé par mon amie bouquiniste… Bon, en fait je m’égare, parce que, premièrement Attali n’est pas ministre, deuxièmement, seuls les gens « qui comptent » recevront l’émanation de sa matière grise, donc pas moi. Je continuerai à allumer ma chaudière avec « Paru-Vendu », dont le contenu, sur le plan sociologique, est au moins aussi intéressant.
C’est marrant cette manie des rapports. Prenez cinquante personnalités politiques actuelles, un peu en vue sur le plan médiatique (on appelle ça des « experts »). Elles font toutes partie d’une commission quelconque ; elles sont toutes chargées – moyennant finances bien sûr – de rédiger un épais rapport sur un sujet quelconque. Je parlais de Luc Ferry. Et bien ce Monsieur a fait partie successivement, depuis qu’il n’est plus ministre, d’une « mission de réflexion » (variante – le terme « rapport » posait problème) sur « l’homosexualité et le mariage homosexuel » puis d’un « comité de réflexion » (variante – mais il réfléchit toujours) sur « la modernisation et le rééquilibrage des institutions », en attendant qu’on le charge d’une quelconque étude sur « les carottes biologiques » ou « la rénovation des techniques ostréicoles en Charente ».
Il y a quand même une constante dans tous ces « papiers » et l’étude de la fréquence d’emploi de certains termes ferait certainement la joie d’un linguiste ou d’un statisticien. Je ne suis ni l’un ni l’autre, mais j’ai quand même noté que l’on parlait constamment de « modernisation » et de « dérèglementation », de « productivité » et de « rationalisation »… Nous vivons dans un pays qui « traîne comme un boulet » une tradition de lutte ouvrière et syndicale de plus d’un siècle. Tout ce que certains d’entre nous appelons « progrès » ou « acquis sociaux », par exemple, comme le fait que les enfants ne travaillent plus à la mine, que les travailleurs aient droit à des pensions, des congés payés, des indemnités en cas de maladie, la durée du travail réglementé… tout ça, c’est « vieux » et ça doit être modernisé. Ces « archaïsmes à la française » ralentissent considérablement notre passage à l’âge d’or libéral dont rêvent nos pieux croisés de la mondialisation capitaliste. La France est malade, mais, rassurez-vous, le docteur Gargasarkomel va la soigner. Les électrochocs reviennent à la mode.
Et le « rapport Attali » dans tout ça ? Je vous ai dit qu’il me donnait la nausée. Je vais me soigner. « Into the Wild » m’a donné envie de relire « Volkswagen blues » de Jacques Poulin… Ça, y’a pas de doute, c’est un livre ! Vous ne connaissez pas Jacques Poulin, écrivain québecois ? Faites un tour chez votre libraire et demandez lui « Vieux chagrin » ou « la tournée d’automne ». Je vous en parlerai bientôt, juste après la recette du Pounti. Désolé François !
2 Comments so far...
fred Says:
22 janvier 2008 at 09:30.
Ta diatribe Anti-Attali a fait de moi un révolté du Pounti ! (désolé !)
Ta femme Says:
23 janvier 2008 at 13:46.
A propos du bouquin pourri de Luc Ferry, j’ai poussé les scrupules jusqu’à l’ouvrir au hasard, en changeant soigneusement de secteur dans le bouquin, hein ! Eh bien après quelques tentatives, je n’ai trouvé absolument que la notion de RÉPRESSION à chacune des pages survolées.
Moi aussi j’ai une super nausée, je vais me jeter une petite avèze vois si ça me remet les intérieurs en place.