23 septembre 2009

Pierre, sable, bois et eau

Posté par Paul dans la catégorie : Carnets de voyage .

Carte postale du Portugal – 4 –

nazare La falaise domine la mer. Un escalier aux marches innombrables permet de descendre jusqu’à la plage immense. Le village occupe trois emplacements différents, comme s’il avait migré, tout au long de son histoire, en laissant derrière lui les marques de son occupation précédente. Vue du haut, la mer semble onduler doucement et les vagues s’étaler paresseusement sur le sable fin. Vues du bas, les maisons blanches évoquent un décor miniature. S’il n’y avait pas cette immensité d’eau et de sable, on pourrait se croire à Santorin dans la mer Egée. Les ondulations de la mer sont en fait de vigoureux rouleaux qui se jettent par vagues successives sur la plaine dorée. Les éléments ne sont pas déchaînés mais suffisamment dynamiques pour décourager toute velléité de baignade. A part quelques corps paresseusement étalés au soleil, il n’y a d’ailleurs pas grand monde sur le sable. La maigre foule se presse plutôt aux terrasses des cafés ou devant les vitrines des échoppes qui offrent aux badauds sacs en toile du Népal, lainages du Maroc ou babioles biscornues venues d’on ne sait trop quelle planète. Les taches de couleur de ces touristes à la fois nonchalants et agités font un contraste saisissant avec les vêtements noirs des femmes de pêcheurs. Celles-ci semblent plus intéressées par les derniers rayons du soleil, l’exotisme des passants ou les quelques mots échangés avec leurs proches, que par la vente des fruits secs qu’elles étalent devant elles. L’ambiance est paisible ; le bruit des vagues couvre en partie le ronflement des moteurs impatients. Nazaré… Le regard de l’Estrémadure est tourné vers l’océan.

pombal La forteresse de pierre domine le petit bourg aux toitures bariolées. Du haut du donjon on entend les bruits de l’activité humaine et surtout les cris des enfants qui jouent dans une cour de récréation. Les templiers ont construit cette forteresse à l’époque où les Maures venaient juste de quitter le pays. Les éléments d’architecture se mélangent de façon subtile. Impossible de se croire ailleurs qu’ici. Les châteaux, comme les villes ou les paysages, ont une personnalité et on ne peut imaginer une forteresse du cœur du Portugal perchée sur une colline des Vosges. Voyage dans le temps. Que penserait le commandeur, maître d’œuvre de ce bâtiment à la fois austère et distingué, s’il voyait toutes ces fourmis s’agiter un peu plus bas dans les ruelles de sa cité ? Comment comprendrait-il la raison d’être de tous ces cubes de béton hideux qui courent dans la plaine jusqu’à l’horizon ? Sur les crêtes lointaines de la Serra Lousã se dressent une multitude d’étoiles accrochées au sommet de mâtures improbables, moulins à vent des temps modernes. Aurait-il une clé pour déchiffrer toutes ces énigmes ? Pombal… Mélange de deux époques… souvenir anachronique de croisades antiques.

talasna Le hameau se dresse tout en haut d’un vallon boisé. Il domine de sa sagesse une vaste étendue de châtaigniers, de pins et d’eucalyptus. Il est si discret… l’on ne découvre son existence qu’au terme d’un long cheminement le long d’un torrent qui s’essouffle tant son maigre filet d’eau paraît incapable de vaincre la résistance des rochers. On l’imagine plus impétueux lorsque l’on découvre les branches qu’il a charriées lors de ses crises de colère. De tout temps les hommes ont cherché à le dresser et à tirer partie de l’énergie qu’il distribuait à corps perdu. La roue à aubes du vieux moulin a disparu, et l’on n’entend plus aucun grincement dans ses rouages. Une installation plus moderne, petite retenue, turbine hydro-électrique, subsiste dans un sombre recoin. Elle semble encore en activité. Le seul être vivant à y résider en ce jour est un molosse enchaîné qui témoigne de sa curiosité ou de sa colère devant l’arrivée d’intrus en tirant sur sa chaîne et en aboyant le plus fort possible. Une heure, deux heures de marche. Les premières maisons du hameau sont en ruine. Le chemin devient ruelle puis ruelles, transformant ce hâvre de paix en labyrinthe inquiétant pour le marcheur fatigué. Dans un passage un peu plus frais, un peu plus ombragé que les autres, s’ouvre une porte mystérieuse. Le promeneur jette un œil intrigué. L’œil a du mal à s’habituer à l’obscurité. Une table, des chaises, un hôte accueillant… vision fugitive d’un paradis terrestre à portée de main. Qu’il est bon de se poser un peu lorsque la fatigue se fait sentir ; qu’il est bon de boire un grand verre bien frais lorsque la soir dessèche le gosier. Talasna… Oasis de bonheur dans la serra Lousã.

plage-de-nazare

2 Comments so far...

François Says:

23 septembre 2009 at 20:20.

Merci de nous faire rêver, Paul.

Paul Says:

27 septembre 2009 at 13:54.

Un petit bonjour d’Evora dans le sud du Portugal, par un beau dimanche ensoleillé. La ville est très jolie et très calme par rapport à Lisbonne. Difficile par contre de poster des chroniques car les accès internet sont très aléatoires !

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