24 décembre 2009

Ça sent le sapin, mais la guirlande clignote…

Posté par Paul dans la catégorie : au jour le jour... .

sapin-joyeux J’aurais aimé vous raconter une belle petite histoire de Noël comme on sait si bien le faire dans les contes traditionnels ou dans les almanachs populaires où les miracles s’égrènent tout au long de la « Sainte nuit ». Seulement, voilà le problème, l’inspiration n’y est pas. Je n’ai aucune envie d’écrire en respectant les consignes données en ce genre d’occasion, à savoir, placer dans un texte d’une longueur raisonnable les mots sapin, cadeaux, cheminée, pantoufles, famille, béatitude, dinde, marrons… Je n’ai pas le cœur à le faire, non pas parce que je serais un tant soit peu dépressif et peu enclin à festoyer (rassurez-vous, nous respecterons la tradition à cette occasion-là comme pour d’autres) mais parce que dès que mon regard se porte vers un horizon plus lointain que les limites de mon petit domaine, je suis terriblement inquiet. D’où une furieuse envie de jouer à l’autruche et de me plonger dans la contemplation de ma petite bulle, tout aussi égoïste que peu réaliste. Seule la France éternelle est protégée des nuages radioactifs par ses merveilleuses frontières. Ma principauté arborée ne l’est pas : il n’y pleut pas lorsqu’il fait sec tout autour et nos revenus n’augmentent pas lorsque les règles du jeu économique se font plus féroces. Les raisons que j’ai d’être optimiste se limitent essentiellement à un environnement très proche, une sorte de microcosme privilégié. N’ayant pas pour but de transformer ce blog qui est un espace privé-public en journal intime, je ne vous gaverai pas avec mes pensées profondes. Je ne veux pas non plus être l’artisan d’une sinistrose globale qui n’a rien de bon pour personne, donc j’attendrai un jour ou deux avant de vous dire tout le mal que je pense de l’année à venir. Je ne peux résister cependant à l’envie de vous signaler un fait-divers qui a contribué à cet état de malaise. Les plus endurcis d’entre vous penseront sans doute qu’il n’y a pas de quoi « fouetter un chat » et que l’histoire à laquelle je fais allusion se répète des milliers de fois au sein de la communauté d’être humains à laquelle nous appartenons. Ce n’est effectivement qu’un triste symbole du mal être dans lequel notre société évolue. N’empêche…

noel_sapin Hier matin, j’avais bien commencé à rédiger une petite nouvelle sympa, un peu mièvre mais pas trop, juste dans le ton bon chic bon genre qu’il vaut mieux employer pour ne pas gâcher un repas de famille par des considérations trop sérieuses. Pour tout dire, je n’étais pas enthousiasmé par mon texte. J’ai donc fait une petite pause, un petit tour dans l’actualité et dans les blogs histoire d’alimenter mon prochain « bric à blog » et je suis tombé sur un fait divers qui m’a coupé toute envie de terminer mon récit. C’est une histoire tragique, sans doute banale, mille fois répétée, mais il y avait un tel décalage avec ce que j’écrivais que j’ai tout arrêté. Le bref article d’info du site de l’Express avait pour titre : « un bébé survit à une chute de 70 mètres à Etretat ». L’art du journalisme c’est paraît-il de savoir donner un éclairage particulier aux faits. Dans le contexte, c’est plutôt genre « miracle de Noël »… La suite du texte n’a pourtant rien de réjouissant ; il ne s’agit pas en effet d’un accident : « La fillette de vingt mois était dans les bras de sa mère qui s’est suicidée en se jetant dans le vide. » La citation peut s’arrêter là, le reste n’est que détails sordides. Le rédacteur, soucieux de précisions, informe le lecteur qu’il s’agit – du moins en ce qui concerne le suicide – d’un fait assez courant : dans la même journée, une autre femme s’est jetée  du haut des falaises dans le même secteur. J’imagine un instant la somme de désespoir à laquelle il faut en arriver pour prendre une décision pareille : se précipiter dans le vide avec son bébé dans les bras. Je ne suis pas un lecteur assidu des faits-divers et j’ai horreur du voyeurisme mais cette histoire m’a donné des frissons dans le dos. Ce n’est pas le fait de me raisonner en me disant que des milliers de personnes arrivaient à cette période des fêtes avec pour seul objectif le fait d’en finir avec la vie qui m’a remonté le moral. Drames individuels s’insérant subrepticement dans le drame collectif d’une société dont les objectifs ne font plus rêver grand monde. Signes avant-coureurs du suicide collectif vers lequel nous nous précipitons si le profit individuel continue à n’être que le seul lien « fédérateur » de cette planète.

sapin Il n’est pas de bon ton de rester sur des pensées pareilles. Je suis donc reparti dans mes chimères intellectuelles à chercher une lueur dans le brouillard. J’ai offert à mon moral social en berne le discours d’Evo Moralès, le président bolivien, à Copenhague. Ce n’est sans doute qu’un dirigeant politique parmi d’autres et mieux vaut rester méfiant, puisque – c’est vérifié – le pouvoir finit par corrompre. Il n’en reste pas moins qu’il donne au moins l’impression d’être nettement moins borné que ses congénères de droite comme de gauche. Poursuivant dans cette démarche positiviste, j’ai ensuite zappé sur une interview de Michel Serres, toujours sur le même sujet… Je me suis fait une relecture apaisante du dernier numéro de l’âge de faire et j’ai dressé la liste des arbres qu’il me restait à planter et des améliorations à apporter à mon paradis terrestre. Prenons les événements du bon côté ; il reste sans doute quelques lueurs d’espoir, genre la lumière vacillante d’une bougie sur un sapin de Noël en plein cœur du brouillard… par exemple… Et j’ai entonné le couplet indispensable à toute bonne chronique rédigée un 24 décembre : « Joyeuses fêtes ! » Offrez à vos proches ce que la société ne sait pas offrir à ses membres : un peu de chaleur et un instant prolongé de bonheur. Une étincelle dans le regard suffit parfois.

la-feuille-charbinoise

6 Comments so far...

zoë Says:

24 décembre 2009 at 15:53.

Cher Paul, nous ne pouvons porter sur nos frêles épaules le poids du monde. Les niveaux de désespérance et de solitude montent, montent. Sachons au moins ne pas désespérer nos proches. Ce n’est déjà pas si facile qu’on le prétend. Je vous embrasse fraternellement, juste avant que naisse le divin enfant.

Paul Says:

24 décembre 2009 at 17:43.

C’est tout à fait vrai Zoë. C’est juste qu’à un moment, comme ça, y’a le pied qui glisse et on se dit… que la minute d’avant on était un peu trop à côté de la plaque.
Pour ce qui est de la crèche on est prêts : s’il est siamois ou un peu angora… on le garde !
Quant à la bise, elle me va droit au cœur et je la garde bien à l’abri des convoitises !

Clopin Says:

25 décembre 2009 at 18:51.

Même malaise que toi, Paul. Ma bulle n’est pas non plus à l’abri mais bien qu’Etretat ne soit pas si loin que ça, j’ai quand même envie de voir la suite…

Lavande Says:

25 décembre 2009 at 22:00.

A tous les amateurs d’arbres (et il devrait y en avoir beaucoup ici!) un conseil d’amie: allez voir AVATAR. Bien que n’étant pas portée sur la science fiction j’ai été subjuguée!

Joyeux Noël à tous!

sophie Says:

26 décembre 2009 at 23:45.

J’ai aussi entendu parler de cette sordide histoire d’Etretat! Je plains surtout le bébé!!! Dur dur de vivre quand tu sais que ta mère a préféré que tu meures….
Allez, joyeux Noël tout de même!

fred Says:

28 décembre 2009 at 08:58.

ça me rappelle une vieille chanson …
« Les fadaises d’Etretat » !
Qui se terminait ainsi : « Et si vous n’aimez pas ça, allez plutôt à BERCK ! »

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